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Amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation de l'Allier
 
PERRETTE Maurice Philippe


est né le 21 juillet 1924 au lieu-dit Les Brenons aux Guerreaux (71). Son père Simon et sa mère Jeanne née ROBERT sont cultivateurs.

Il est employé comme ouvrier agricole chez ses parents au Péage à Molinet (03).

Source de la photo ci-contre: Office Départemental des Anciens Combattants de l'Allier.
 

Selon une fiche de renseignements  de la police,en janvier 1942, il sauve la vie d’un militaire allemand qui se noyait dans le canal latéral à la Loire à Molinet.

Il participe avec d’autres copains de résistance  à la collecte d’armes, de munitions et d’explosifs qu’ils cachent pour être utilisés ultérieurement et qui ne seront jamais découverts. Mais ce n’est pas pour cette raison  qu’il est arrêté le 9 septembre 1943. Selon la fiche de renseignements de la police, il est "accusé d'avoir coupé les pneus de bicyclette d'une jeune fille qui revenait de travailler en Allemagne"

La jeune fille en question s'appelle Lucette PLUCHERY. Elle était partie travailler volontairement en Allemagne et c'est au cours de son retour en permission à Molinet que les faits se sont produits. 

Selon la même fiche de renseignements de la police,
« Une pétition de la municipalité de Molinet signée par 103 habitants est transmise le 15 septembre 1943 à la Kommandantur de Moulins ». 

Le Préfet de l'Allier transmet le 4 novembre 1943 une copie de la pétition au Commandant de la Feldgendarmerie de Paray-le-Monial  et lui demande d'envisager la libération de ce jeune homme dont il rappelle qu'il a sauvé "en janvier 1942 un soldat allemand qui se noyait dans le canal au lieu dit ""Péage de Molinet"".

Le 20 novembre 1943 le Préfet de l'Allier répond au maire de Molinet: " J'ai le regret de vous informer qu'une réponse nettement défavorable m'a été adressée".

En effet voici la réponse du Commandant de la Feldgendarmerie de Paray-le-Monial:

 A  Monsieur le Préfet de l'Allier
           à   MOULINS
"Comme suite à votre lettre citée en référence relative à l'affaire PERETTE Maurice nous vous communiquons que le sauvetage par Perette d'un soldat allemand qui était en train de se noyer ( ce qui est d'ailleurs un devoir élémentaire d'humanité) a été récompensé. Néanmoins le Tribunal a pris ce fait en considération pour ne pas infliger une peine d'emprisonnement de plusieurs années, sanction qui avait été envisagée de prime abord, mais de s'en tenir à une détention de moindre durée, bien que la manière d'agir de Perette avec les deux jeunes filles sans secours et qui méritent la compassion (l'une d'elles va encore à l'école) soit vulgaire au plus haut point, absolument indigne d'un Français ayant le sens de l'honneur et uniquement provoquée par des convictions anti-allemandes dignes d'un esprit arriéré. Cette attitude anti-allemande est d'ailleurs prouvée par les dépositions, sous la foi du serment, des témoins et par la fuite de Veillerod, Deshoubes et Fajolle".
                                signé: HAASE
                                Conseiller à la Cour Martiale


Ses copains ne seront pas arrêtés. Quant à Maurice il va passer 3 jours à Paray-le Monial (71) où il est interrogé. Puis il est transféré à la prison allemande de Chalon-sur-Saône où il est mis à l'isolement en cellule 14 pendant deux semaines. Puis il est emmené avec deux autres prisonniers au siège de la Gestapo qui se trouve à côté de la gare. Il y subit un interrogatoire qu'il qualifie de "musclé". Il va être ramené à la prison de Chalon-sur-Saône au bout de 8 jours.

Le 15 novembre 1943 il est transféré en train par la Feldgendarmerie au Fort d’Hauteville-lès-Dijon où il est inscrit sur le registre d'écrou sous le N° 3158. Il va y rester pendant six semaines en salle commune.

Source du document ci-dessus: Archives Départementales de la Côte-d'Or 1409 W 8.

Il est  condamné par le Tribunal Militaire de Dijon  aux Travaux Forcés. Il doit renvoyer tous ses effets y compris sa montre à ses parents, ce qui le démoralise complètement.

Il fait partie du groupe de 34 hommes qui sont  déportés en wagons à bestiaux  le 29 décembre 1943 de Dijon à Sarrebruck, prison de la capitale de la Sarre. Ils sont internés dans des cellules.

Pour les occuper, leurs geôliers leur font frotter des briques pour récupérer la poudre qui va être utilisée pour faire briller les poignées des portes des cellules !!! Il va y rester 17 jours.

Sur les 34 hommes , 25 dont Maurice PERRETTE vont être transférés le 5 janvier 1944 à Preungesheim, prison située près de Francfort-sur-le-Main.

Source des documents ci-dessus: Service International de Recherche d'Arolsen 1.2.2.1/11548035.

Comme le souligne le livre mémorial de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation, ce transfert est "à replacer dans le contexte du besoin vital de main-d’œuvre dont souffre l’économie de guerre nazie. Les prisons, par le travail qu’elles imposent aux détenus dans leur sein même ou dans des usines extérieures, font partie intégrante de ce système qui permet de remplacer les Allemands partis au front ".

Comme les autres déportés dans les camps de concentration, il va devoir revêtir la tenue rayée. Bien qu’internés en prison, ils vont travailler : d’abord, pour   IG Farben Industrie qui est une  usine de colorants synthétiques à Francfort. Ils  portent et empilent des sacs d’engrais. Puis ils vont être utilisés pour réparer les  voies ferrées endommagées par les bombardements alliés, ce qui est beaucoup plus dangereux.

Début avril 1945, leurs gardiens ayant abandonné leur poste, ils partent sur les routes vers l’ouest. Ils vont croiser la 1ère Armée Française, puis des chars d’assaut américains.

Ils sont emmenés à  Mayence où ils logent dans une ex caserne des SS. Ils passent le  Rhin en camions sur un pont bateau  et arrivent via le Luxembourg à l’Hôtel Lutétia  à Paris le 26 avril 1945.

Source des documents ci-dessus: AFMD 75.

Epilogue concernant Lucette PLUCHERY: Repartie en Allemagne le 30 août 1944 avec deux Allemands, cette collaboratrice, considérée comme responsable  de  la  déportation de  Maurice  PERRETTE  entre autres  méfaits,  sera  condamnée  à  mort par  contumace le  4  mai 1945 pour intelligence avec l'ennemi, puis,  à son retour d'Allemagne, à 20 ans de Travaux Forcés et à la dégradation à vie le 18 juillet 1945.

Le 29 septembre 1945 Maurice PERRETTE épouse Denise REVILLET  à Coulanges (03). Ils auront 2 enfants, 5 petits-enfants et 10 arrière-petits-enfants.

Conscient du devoir de mémoire, il participe aux cérémonies patriotiques et adhère à l'Association Départementale des Déportés et Internés, Résistants et Patriotes.Il ne manque jamais la cérémonie du dernier dimanche d’avril consacrée à la Mémoire de la Déportation et adhère à l'association des Amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation (AFMD) de l'Allier. Il participe également à plusieurs conférences organisées par l’AFMD de l’Allier qui a recueilli son témoignage.

Document de gauche: Maurice PERRETTE déposant une gerbe au Monument aux Morts de Molinet. Source: Archives de la famille.

Document de droite: Carte d'adhérent à la FNDIRP . Source: Archives de l'Association Départementale des Déportés et Internés, Résistants et Patriotes.


La carte de Déporté Politique N° 1.111.25396 lui est attribuée sur décision du Ministère des Anciens Combattants et Victimes de Guerre en date du 23 octobre 1958.

Source du document ci-dessus: Direction Interdépartementale des Anciens Combattants de Clermont-Ferrand.

Il reprend son métier d'agriculteur jusqu'en 1948, puis  il va travailler en usine à  Digoin (71) au montage de charpentes métalliques et enfin comme  chauffeur de camion  jusqu’à la retraite.

Il décède le 23 janvier 2015 à Roanne (42) et est inhumé au cimetière de Molinet. L'oraison funèbre est prononcée par le président de l'AFMD de l'Allier.


Sources :

- Archives Départementales de l’Allier 1864 W 1, 1289 W 91, JAL 102/2,

- Archives Départementales de la Côte-d’Or  1409 W 8

- Archives de l’Association des Déportés et Internés, Résistants et Patriotes de l’Allier

- Archives de la famille

- Direction Interdépartementale des Anciens Combattants de Clermont-Ferrand

- Etat civil de Les Guerreaux (71)

- Livre mémorial de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation Editions Tirésias 2004

- Office Départemental des Anciens Combattants de l'Allier

- Service International de Recherches d’Arolsen 1.2.2.1/11548035, 1.2.2.1/11298273, 1.2.2.1/11298274, 2.1.1.1/70321818, 2.1.1.1/70323324,

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