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Amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation de l'Allier
 
BLOCH née LÉVY Louise Laure Marie
 
 
Archives de la famille

est née le 15 juin 1858 au domicile de ses parents commune de l'Hôpital et Carling (57). Son père Joseph est ingénieur des Mines  et directeur des travaux de la Houillère de Carling et sa mère Justine née  LÉVI est sans profession.
Elle est veuve de Richard BLOCH, ancien chef de l'Exploitation de la Compagnie du Chemin de Fer P.O.(Paris-Orléans).
Elle quitte son domicile 103, Boulevard Malesherbes à Paris (8ème) pour s'installer à Nice (06) pour raisons de santé. Elle vient "suivre un traitement"  à Néris-les-Bains (03), une station thermale proche de Montluçon, et prend pension à l'Hôtel du Jardin  en 1942.

Photo: Archives de la famille.
 
 
Son nom figure  sur l'"Etat récapitulatif des Israélites résidant dans la commune" de Néris-les-Bains, état concernant les Israélites français signé par le maire le 25 août 1942. Il est indiqué dans la 7ème colonne qu'elle serait arrivée dans l'Allier le 24 mai 1940. Elle aurait résidé d'abord Villa Les Iris, puis à l'Hôtel du Jardin  en 1942.
 
Elle ne réside que temporairement à Néris-les-Bains. Elle n'y est recensée ni en 1941 ni en 1943. Pourtant elle reçoit -comme beaucoup de Juifs de l'Allier - une lettre du préfet de l'Allier datée du 27 août 1942 lui notifiant sa mise en demeure d'avoir à quitter le département de l'Allier: en clair elle est expulsée! Des cas d'exemptions sont prévus. Louise BLOCH adresse d'abord une réclamation, puis une requête motivée au Préfet de l'Allier , requête dans laquelle elle exprime sa fierté d'appartenir à «une famille française et juive».
 
Source: Archives Départementales de l'Allier 996 W 270
 

Hôtel du Jardin                                                                                                            30 août 1942

Néris les Bains

Allier

Monsieur le Préfet,

Par votre lettre du 27 août, vous me mettez en demeure, comme étant de religion juive, de quitter le département de l'Allier et de ne pas m'installer dans un département côtier.

Je sollicite par la présente requête d'être autorisée à demeurer jusqu'au 30 septembre à Néris où je suis venue suivre un traitement, et à retourner en suite à Nice où j'ai établi ma résidence.
 
(...)
 
J'ajouterai ceci:

Ma famille est française depuis au moins le traité de Westphalie. Je pourrais être considérée comme alsacienne-lorraine réfugiée; mais ce serait au titre de la guerre 1870-1871, après laquelle ma famille a abandonné tout ce qu'elle possédait pour demeurer française…. cependant que mon futur mari gagnait dans les mobiles de l'Yonne la médaille militaire, qu'il portait avec trois de ses camarades seulement, quand il est entré à Polytechnique dans la promotion 1872. Il est devenu plus tard Officier de la Légion d'Honneur, Ingénieur en Chef des Ponts et Chaussées et Chef de l'Exploitation du P.O.

De mes trois fils, l'aîné est Officier de la Légion d'Honneur au titre militaire avec 4 citations à l'ordre de l'Armée (dont 3 signées Pétain). Mon second fils est également Officier de la Légion d'Honneur avec plusieurs blessures et citations. Mon troisième fils enfin est Chevalier avec plusieurs citations.

Cette énumération n'est pas destinée à faire un vain étalage d'une partie de ce qu'a pu faire pour son pays une famille française et juive. Ce qu'elle a fait, ce qu'elle est prête à faire encore, elle le considère et le considérera comme son devoir strict.

Mais ce bref rappel vous permettra sans doute de comprendre, Monsieur le Préfet, ce que -sans courber la tête- peut souffrir une femme, une mère française qui se voit, à un âge avancé et après avoir traversé trois guerres, contester ses droits à vivre en française.

J'ose espérer, Monsieur le Préfet, que, sur le vu de ce qui précède, vous voudrez bien faire donner à ma requête une suite favorable et, je le répète, m'autoriser à:

1.- demeurer à Néris jusqu'au 30 septembre 1942

2.- retourner ensuite à Nice où j'ai ma résidence habituelle.

Veuillez agréer, Monsieur le Préfet, l'expression de mes sentiments de haute considération.

 

Elle est arrêtée par la Gestapo de Montluçon dans la rafle du 12 mai 1944  à Néris-les-Bains où elle a pris pension au Splendid Hôtel.  Elle est internée à Vichy (03).

Elle est transférée le 26 mai 1944 à Drancy où elle reçoit le matricule N°23255.

Témoignage de Jacques LONDON déporté de Drancy à Auschwitz dans le convoi N° 75

«Je soussigné, Jacques LONDON, déporté politique, certifie par la présente, que lors de mon passage à Drancy en avril 1944, je me suis trouvé avec Madame Richard BLOCH née Louise LÉVY.

Malgré son âge, Madame Richard BLOCH fut pour nous tous, par son attitude et son action, un modèle d'énergie, de confiance et de résistance.» 

Témoignage transmis par la famille.


Source du document au centre transmis par Nathalie Cappe: Archives Nationales F/9/5681 Fichier Drancy.
Source du document à droite: Mémorial de la Shoah CF143_5151.


Elle est déportée le 30 mai 1944 de Drancy à Auschwitz par le convoi N°75.

Source du document ci-dessus: Mémorial de la Shoah C75_5.

   
Dans Le Mémorial de la Déportation des Juifs de France, Serge Klarsfeld écrit à propos du convoi N° 75: " 534 hommes et 470 femmes ont constitué ce convoi où l'on comptait 104 enfants de moins de 18 ans. (...) A l'arrivée de ce convoi le 2 juin, 239 hommes reçurent les matricules A 11841 à A 12079, tandis que 134 femmes recevaient les matricules A 7065 à A 7198. 624 personnes furent immédiatement gazées. En 1945, on dénombrait 85 survivants dont 51 femmes".

Elle décède le 4 juin 1944 à Auschwitz selon l'état civil de Carling et le JO N° 218 du 20 septembre 1987.

«Mort pour la France»

"Mort en déportation" suivant l'arrêté du Secrétariat d'Etat aux Anciens Combattants en date du 31 juillet 1987 paru au Journal Officiel N° 218 du 20 septembre 1987.

Note: Louise  BLOCH née LÉVY était la grand-mère paternelle de France BLOCH-SÉRAZIN, résistante communiste née le 21 février 1913 à Paris (18ème), guillotinée le 12 février 1943 à Hambourg (Allemagne).


Le  nom de Louise BLOCH née LÉVY figure sur la plaque des "Morts en déportation" à Néris-les-Bains. 

Cette plaque au Monument aux Morts de Néris-les-Bains a été réalisée suite aux recherches de l'AFMD de l'Allier. Elle a été dévoilée le 8 mai 2008 par Monsieur Jean-Claude DE PIN, maire de Néris-les-Bains, Madame Maud LORCH et Madame Colette BOURGOIGNON, vice-présidente de la section Montluçon-Commentry de la FNDIRP. Nous remercions la municipalité de Néris-les-Bains pour son engagement pour la mémoire de la Déportation.

Photo: AFMD de l'Allier

 

Sources:

- Archives Départementales de l'Allier 996 W (778 W 15.3), 654 W 6, 996 W 270,

- Archives de la famille

- Archives Nationales F/9/5681 Fichier Drancy: document transmis par Nathalie Cappe.

- Centre de Documentation Juive Contemporaine C75_5, CF143_5151,

- Etat civil de la commune de l'Hôpital et Carling (57)

- Klarsfeld Serge Liste des transferts à Drancy

- Klarsfeld Serge  Mémorial de la Déportation des Juifs de France  1978

-
yadvashem.org  Feuille de Témoignage

 
 
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